La Cible, magazine officiel de l’IQPF, est destinée aux planificateurs financiers et leur permet d’obtenir des unités de formation continue (UFC). Chaque numéro aborde une étude de cas touchant les différents domaines de la planification financière.
Issue link: https://digital.carswellmedia.com/i/882035
10 lacible | Octobre 2017 FISCALITÉ FIDUCIES POUR LES PERSONNES HANDICAPÉES Hélène Marquis LL.L., D. Fisc., Pl. Fin., TEP Directrice régionale Planification fiscale et successorale Gestion privée de patrimoine CIBC inc. Étude de cas Dans notre chronique du mois d'août 2017, nous avons démontré qu'il n'est pas facile d'obtenir l'attestation d'admissibilité au crédit d'impôt pour personnes handicapées (CIPH). Une fois cette étape franchie avec succès, il demeure que la planification légale et fiscale constitue elle aussi un défi important. La situation d'Anne-Lise et de Jean-Étienne est claire. À moins d'un miracle, leur fille respectera toujours les critères d'admissibilité au CIPH. Il est évident qu'ils doivent maintenant planifier pour sécuriser son avenir de leur vivant et après leur décès. Fiducies légales et fiscales : une incompatibilité génétique Pour la plupart des familles, il est important de maintenir l'accès aux prestations d'aide sociale pour les personnes handicapées. Ces prestations sont non seulement nécessaires pour assurer un revenu, mais aussi pour avoir accès à des soins médicaux spécialisés et à un logement adapté. Jusqu'à récemment, le Tribunal administratif du Québec (TAQ) obligeait systématiquement les prestataires ayant des actifs en fiducie à les utiliser avant de recevoir des paiements d'aide sociale. Fiducies de type « Henson » Ces fiducies permettent de détenir des actifs au bénéfice de personnes handicapées sans qu'elles perdent leurs prestations sociales. Mais contrairement aux provinces de common law, le Québec n'a jamais adopté de loi permettant de créer ce type de fiducie. En droit civil (québécois), on considère la fiducie comme étant un patrimoine d'affectation autonome et distinct sur lequel ni le constituant, ni le fiduciaire, ni le bénéficiaire n'a de droits réels. Les tribunaux supérieurs ont donc récemment élaboré certains critères permettant la création de fiducies qui respecteraient les conditions de la loi et des règlements sur l'aide aux personnes et aux familles 1 , même si les actifs détenus dépassaient les seuils d'avoirs liquides pour être admissible au programme. L'acte constitutif de la fiducie doit prévoir l'affectation spécifique du patrimoine fiduciaire et des revenus pour qu'en aucun moment les besoins de base déjà couverts par un régime public ne soient couverts par la fiducie. La fiducie doit être pleinement discrétionnaire : le fiduciaire doit disposer d'une discrétion absolue quant aux décisions visant les distributions de la fiducie. Personne d'autre – ni le bénéficiaire ni le curateur public – ne peut demander ou exiger la distribution du capital ou des revenus de la fiducie. Enfin, le fiduciaire est contraint de gérer les actifs de la fiducie en respectant les directives fermes de l'auteur. Les fiducies fiscales Malgré cette percée importante en droit social, il demeure que le mariage avec le droit fiscal rend très difficile la création de ce type de fiducie. En fait, malgré ses imperfections, seul le Régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI) constitue un outil fiscal vraiment efficace pour les personnes handicapées, pourvu que le bénéficiaire maintienne son admissibilité au CIPH. Au chapitre des fiducies fiscales, nous retrouvons le choix de bénéficiaires privilégiés, la fiducie de prestation à vie (FPV) et la fiducie admissible pour personne handicapée (FAPH). Le choix de bénéficiaires privilégiés Il s'agit d'un choix annuel, possible pour les fiducies entre vifs et les fiducies testamentaires. Il permet de conserver les revenus dans la fiducie, mais de les imposer dans les mains du bénéficiaire privilégié à un taux moindre. Le bénéficiaire privilégié doit être admissible au CIPH ou, s'il est âgé de plus de 18 ans, être entièrement à charge en raison d'une déficience physique ou mentale. Comme le bénéficiaire doit inscrire dans sa déclaration de revenus le montant attribué, ce montant pourrait éventuellement être considéré comme payable. Il y a donc un risque important que soit niée la qualité de fiducie de type « Henson » telle que développée par la jurisprudence. 1 Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, RLRQ, c. A-13.1.1.