La Cible, magazine officiel de l’IQPF, est destinée aux planificateurs financiers et leur permet d’obtenir des unités de formation continue (UFC). Chaque numéro aborde une étude de cas touchant les différents domaines de la planification financière.
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10 lacible | Octobre 2020 FISCALITÉ QUAND LA FISCALITÉ SE FAIT RAMASSER PAR LE DROIT : RENTE ENREGISTRÉE À UN MINEUR Au décès de son titulaire, un REER peut être roulé dans une rente enregistrée dont l'enfant mineur et à charge du titulaire est le rentier et dont la durée de service est de 18 ans moins l'âge du rentier. Cette rente enregistrée est décrite à la division (B) de l'alinéa 60I)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu (L.I.R.) : (B) dont est rentier le contribuable pour un nombre d'années ne dépassant pas la différence entre 18 et l'âge du contribuable en années accomplies au moment de l'achat de la rente […] L'achat d'une rente enregistrée au mineur a pour effet d'étaler le revenu imposable sur plusieurs années d'imposition. De cette façon, la somme investie dans la rente peut bénéficier du système de taux progressifs, plutôt que d'être déclarée dans la même année d'imposition et être ainsi assujettie à un taux d'impôt beaucoup plus élevé. Parfois, l'achat de la rente est prévu dans le testament (administration du liquidateur ou du fiduciaire, administration prolongée, legs conditionnel). Cet article ne concerne pas cette situation. Généralement, le tuteur à l'enfant mineur est la personne qui prend la décision d'investir ou non dans une telle rente la somme reçue du REER du défunt. Le tuteur à l'enfant mineur n'a que des pouvoirs de simple administration et il doit prendre des décisions qui permettent à l'enfant d'avoir pleinement accès à son argent à 18 ans. Il ne peut faire que des placements présumés sûrs au sens des articles 1339 à 1344 du Code civil du Québec (C.c.Q.) : Art. 208 C.c.Q. : Le tuteur agit à l'égard des biens du mineur à titre d'administrateur chargé de la simple administration. Or, les rentes sont absentes de la liste des placements présumés sûrs du Code civil. De ce fait, le tuteur ne peut choisir d'acheter une telle rente (et, s'il le fait, il est responsable des pertes occasionnées). Pourtant, en pratique, presque tout le monde choisit d'acheter la rente, car il s'agit presque toujours d'une bonne (sinon la meilleure) décision fiscale et financière. Voici un sommaire des points en faveur de l'achat de la rente : • Diminution et report du fardeau fiscal (rendement avant et après impôt augmenté) ; • Versements garantis et fixes ; • Quasi-impossibilité de perdre son argent puisque le débirentier (l'assureur) est très hautement solvable et garanti par Assuris (il y a aussi des cas où la rente est servie par une société de fiducie). C'est donc un placement sûr, mais pas présumé sûr selon le Code civil. Et voici un sommaire des points en défaveur de l'achat de la rente : • Le Code civil ne le permet pas ! Pas besoin de s'épancher longtemps avec des calculs compliqués pour voir que la somme des arguments en faveur de la stratégie dépasse de loin celle des arguments en défaveur de la stratégie. L'intérêt du client est l'achat de la rente, c'est le Code civil qui ne suit pas. Du point de vue déontologique, il faut se demander si le planificateur financier peut recommander une stratégie illégale. Et la réponse est… NON ! Voici, selon nous, les articles pertinents du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r. 3), que les planificateurs financiers sont tenus de suivre : 12. Le représentant doit agir envers son client ou tout client éventuel avec probité et en conseiller consciencieux, notamment en lui donnant tous les renseignements qui pourraient être nécessaires ou utiles. Il doit accomplir les démarches raisonnables afin de bien conseiller son client. Le planificateur financier doit, selon nous, aviser le tuteur que les tuteurs aux enfants mineurs en général doivent faire des placements présumés sûrs au sens du Code civil. Il devrait aussi conseiller au tuteur de consulter un juriste. 13. Le représentant doit exposer à son client ou à tout client éventuel, de façon complète et objective, la nature, les avantages et les inconvénients du Serge Lessard Avocat, Pl. Fin., FLMI Vice-président adjoint régional Québec et Atlantique, Service de fiscalité, retraite et planification successorale Investissements Manuvie