La Cible, magazine officiel de l’IQPF, est destinée aux planificateurs financiers et leur permet d’obtenir des unités de formation continue (UFC). Chaque numéro aborde une étude de cas touchant les différents domaines de la planification financière.
Issue link: https://digital.carswellmedia.com/i/1009586
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lacible | Août 2018
PLACEMENTS
CONCENTRER OU
DIVERSIFIER ?
Denis Preston
CPA, CGA, FRM, Pl. Fin.
Formateur et consultant
Étude de cas
Justin veut investir dans les géants du web. Il
pense que l'avenir leur appartient. D'ailleurs, leurs
récentes performances boursières semblent lui
donner raison.
Victoria, elle, veut avoir un portefeuille diversifié.
Elle considère plutôt que si elle ne mise que sur
quelques titres, qu'elle met tous ses œufs dans
le même panier, les conséquences de se tromper
peuvent être énormes. Elle se souvient qu'elle avait
investi ses économies dans des géants comme
Enron, WorldCom, Nortel, Bre-X et Research
in Motion (BlackBerry), tous des actions alors
tendance (qui avaient du « momentum »). Plusieurs
de ces entreprises ont fait faillite depuis, certaines
sont devenues des zombies ou presque.
Qui a raison, Justin ou Victoria ?
Les résultats d'une recherche du professeur de
finances Hendrik Bessembider
1
donnent raison aux
deux !
Il a analysé les rendements des 25 967 actions
cotées aux bourses américaines pendant la période
de 1926 à 2016. La particularité de cette étude est
qu'elle tient compte des actions qui ont fusionné
ou qui ont été liquidées (12 560) et de celles que
les bourses ont délestées (9 187). Beaucoup trop
d'études ou bases de données (par exemple,
Morningstar, The Globe and Mail, etc.) ne se basent
que sur les survivants (biais de survie).
Bessembider a constaté que :
• la durée de vie médiane des actions est
seulement de 7,5 ans ;
• moins de la moitié des actions ont eu un
rendement positif ;
• la médiane des actions ne bat pas le rendement
des bons du Trésor ;
• environ 4 % des titres sont responsables de la
moitié de la création de la richesse boursière
(les « winner takes all ») ;
• la moyenne des actions procure un rendement
supérieur aux bons du Trésor ;
• la différence entre la médiane des rendements
et la moyenne des rendements est due à
l'asymétrie des rendements.
Contrairement à une hypothèse très populaire, la
distribution des rendements ne suit pas une loi
normale. Cette hypothèse facilite les calculs et
les exemples, mais les simulations (Monte-Carlo
ou autres) basées sur celle-ci sont souvent trop
optimistes. Voici deux exemples des effets de
l'asymétrie des rendements :
1. Le rendement de deux titres est soit 20 %, soit
– 20 %.
• Dans 25 % des cas, le rendement sera de 44 %,
soit (1 + 20 %) x (1 + 20 %) - 1.
• Dans 50 % des cas, le rendement sera de – 4 %,
soit (1 + 20 %) x (1 - 20 %) - 1.
• Dans 25 % des cas, le rendement sera de
– 36 %, soit (1 - 20 %) x (1 - 20 %) - 1.
• La médiane des rendements est donc de – 4 %.
Mais la moyenne des rendements est de 0 %,
soit (25 % x 44 %) + (50 % X – 4 %) + (25 %
x – 36 %).
2. Le rendement de deux titres est soit 21 %, soit
– 20 %.
• Dans 25 % des cas, le rendement sera de
46,4 %, soit (1 + 21 %) x (1 + 21 %) - 1.
• Dans 50 % des cas, le rendement sera de
– 3,2 %, soit (1 + 21 %) x (1 – 20 %) - 1.
• Dans 25 % des cas, le rendement sera de
– 36 %, soit (1 - 20 %) x (1 - 20 %) - 1.
• La médiane des rendements est donc de
– 3,2 %. Mais la moyenne des rendements est
de 1 %, soit (25 % x 46,4 %) + (50 % X – 3,2 %)
+ (25 % x – 36 %).
À l'aide de ces deux exemples, nous pouvons
constater que même si la médiane des rendements
peut être négative (perte), la moyenne des
rendements peut être positive.
Le capitalisme exerce une forme de darwinisme
envers les sociétés. Plusieurs disparaissent ;
1 « Do Stocks Outperform Treasury Bills? », en ligne :